Lors de l'acquisition d'un cheval, la visite d'achat est une étape cruciale pour s'assurer de l'état de santé général de l'équidé. Elle nécessite une évaluation rigoureuse par un vétérinaire, mais la présence d'un maréchal-ferrant peut apporter une expertise complémentaire précieuse.
Quels sont les points d’attention particuliers spécifiques aux pieds lors de l’acquisition d’un nouveau cheval ? Partage d’expérience avec Marc Herrouin, maréchal-ferrant spécialisé dans la gestion du cheval de sport.
La présence du maréchal lors de la visite d’achat, pour quoi faire ?
La visite d’achat est une consultation vétérinaire. Ce dernier, habitué à effectuer ce type d'examen, se concentre sur une vérification globale de la santé du cheval, en incluant le plus souvent des radiographies, des analyses de sang et en fournissant un rapport détaillé au client.
Cependant, la participation du maréchal-ferrant représente un atout majeur, surtout en ce qui concerne l'examen des pieds. Spécialistes dans ce domaine, les maréchaux voient les chevaux régulièrement, toutes les 5 à 8 semaines. Cette proximité en fait des acteurs majeurs dans la connaissance de la santé des pieds des chevaux qu’ils suivent. L’évaluation des aplombs et de l'état des pieds sont des aspects fondamentaux pour la performance future du cheval.
En complément de leur expérience, des outils comme le logiciel Metron-Hoof permettent aux professionnels de produire des rapports détaillés sur l'état des pieds, comme l'explique Marc Herrouin, maréchal-ferrant participant aux visites d’achat :
“Le vétérinaire effectue des radios et fournit un rapport au client. Le logiciel Metron permet aux maréchaux de faire également un rapport sur l’état des pieds aux clients (s’il est loin, qu’il ne peut pas être là physiquement, pour que le client puisse connaître le Jour J l’état du cheval à l’instant T).
Ce rapport est aussi un bon support au moment de la revente du cheval, pour montrer comment celui-ci a évolué entre le moment de l’achat et le moment de la revente.”
Exemple de rapport Metron-Hoof lors d'une visite d'achat
La présence du maréchal-ferrant lors de la visite d’achat enrichit l’évaluation globale et offre une garantie supplémentaire au futur propriétaire.
« Je pense que les vétérinaires peuvent trouver bénéfique la présence du maréchal-ferrant lors de la visite d’achat pour aborder spécifiquement les points liés aux aplombs et aux pieds, compléter leurs observations, et communiquer avec le client. »
— Marc Herrouin
Les points d’attention lors d’une visite d’achat
Il revient au vétérinaire de procéder aux vérifications complètes et de décider si un cheval « passe » ou non la visite d’achat.
Néanmoins, plusieurs points de vigilance au niveau des pieds sont observés par les professionnels en maréchalerie. Selon le Royal Veterinary College de Londres (RVC), 90 % des boiteries des antérieurs proviennent du pied, ce qui souligne l’importance d’observer les facteurs ci-dessous. Ces derniers sont des indicateurs essentiels à prendre en compte du point de vue du maréchal-ferrant lors de l’acquisition d’un cheval :
- Une différence droite/gauche trop importante entre les pieds
- Des angles palmaires/plantaires négatifs qui semblent difficilement améliorables avec le temps
- Une mauvaise qualité de corne
- La ferrure actuelle : l’usure des fers est-elle anormale, asymétrique ? Le cheval porte-t-il des fers orthopédiques ?
- Des formes de pieds et de couronnes délicates avec un risque élevé de seimes à répétition
« Concernant les seimes, c’est principalement le cas des chevaux qui changent de conditions météorologiques, » explique Marc.
« Par exemple, un cheval venant des pays du Nord qui serait acheté pour être ensuite emmené dans un pays du Sud, comme l’Espagne. Dans le Nord, les taux d’humidité sont plus élevés, ce qui facilite la gestion des seimes. En Espagne, où le climat est beaucoup plus sec, les variations entre la chaleur et les douches fréquentes peuvent rendre la gestion d’un cheval sujet aux seimes plus difficile. Les propriétaires doivent en être conscients, car un cheval qui avait de bons pieds peut devenir plus difficile à gérer, indépendamment de la qualité du nouveau maréchal, » conclut Marc.
"Si le cheval doit porter des ferrures orthopédiques, c’est un point à garder à l’esprit, et c’est encore plus vrai pour les jeunes chevaux qui en ont. Ce sont des signaux importants à prendre en compte lors de l’achat d’un cheval, pour être conscient de la gestion (et des coûts) qu’il faudra peut-être mettre en place à long terme.
Dans la majorité des cas, il est possible de mettre en place des gestions spécifiques et d’améliorer l’état des pieds des chevaux. Cependant, une mauvaise qualité de corne, la présence de ferrures orthopédiques, ou des marques dans le pied indiquant des problèmes passés doivent être prises en compte lors de l’achat.
Le rapport Metron/Ekico est très précieux selon moi, car, en plus du compte rendu des radiographies, il offre au futur propriétaire une vue concrète de l’état des pieds du cheval au moment de l’achat. Avec cela, il n’y a rien à redire ; le client ne peut ensuite accuser personne, car les photos attestent de l’état du cheval au moment de l’achat. Trois ou quatre mois plus tard, ces éléments concrets sont toujours disponibles grâce au rapport.
La formation BSI que j’ai suivie est également un véritable atout dans le contexte des visites d’achat. Les connaissances acquises, que ce soit sur le statique, le dynamique, la palpation, ou l’observation du cheval dans son ensemble, améliorent considérablement ma capacité d’argumentation, tant envers le vétérinaire qu’envers le client." — Marc Herrouin
Trucs et Astuces de pro par Marc Herrouin : Le kit déferrage/referrage
« Lors des visites d’achat, je prépare toujours un kit pour déferrer et referrer le cheval. En tant que maréchal-ferrant, il arrive souvent que le vétérinaire déferre le cheval pour la visite, mais ne puisse pas le referrer ensuite !
On est alors rappelé (généralement la veille du week-end !) pour remettre les fers.
Quand je participe aux visites d’achat, je prévois toujours le nécessaire pour éviter ces petits désagréments aux propriétaires et à mes confrères. »
Les étapes lors d’une visite d’achat en collaboration vétérinaire/maréchal-ferrant
"La visite d’achat est avant tout une consultation vétérinaire. Lorsque je participe à ce type de prestation, je suis donc la trame définie par le praticien chargé de la visite."
— Marc
Du côté du maréchal-ferrant, les observations réalisées par Marc Herrouin suivent les étapes suivantes :
1. Observations du cheval dans sa globalité
"J’observe le cheval dans son ensemble. Comme dans le quotidien, avant de ferrer, je regarde le cheval se déplacer au pas et au trot pour évaluer son état général.
Je prends en compte la taille, le poids, la qualité du poil, et la musculature, bien que mon expertise se concentre principalement sur les parties basses du cheval.
C’est à ce moment que je peux être amené à prendre des mesures des pieds à l’aide du système Metron by Ekico."
2. Observations en statique
"Dans cette phase, je m’interroge sur les aplombs à l’arrêt. Je procède ensuite à l’ensemble de mes palpations : membres, couronnes, pince à sonder. J'examine aussi la forme des pieds et analyse la ferrure actuelle. Quel type de fer le cheval porte-t-il ? A-t-il des plaques ? La ferrure est-elle orthopédique ? Y a-t-il des usures symétriques ou asymétriques ?
Enfin, j’étudie minutieusement le pied en vue dorsale, latérale, et palmaire/plantaire. Ces observations permettent de mettre en évidence les différences entre les pieds. En vue latérale ou diagonale, les pieds sont-ils plus grands ou plus gros ? Quelles sont leurs formes, etc. ?"
3. Observations en dynamique
"Les aplombs sont maintenant observés en mouvement. Je réalise ces observations pendant les tests de flexion effectués par le vétérinaire. Certaines réactions de l’animal peuvent être éclairées par mon expérience en tant que maréchal-ferrant.
Les observations dynamiques se terminent aux trois allures : au pas, au trot, et au galop, sur le cercle, sur surface dure et sur surface souple."
4. Les radiographies
"La dernière étape de la visite est l’imagerie. Le vétérinaire réalise à ce stade ses examens avec les radiographies des parties hautes (par exemple, de la colonne vertébrale, des tarses, etc.). Je ne participe pas à ce type d'examen.
C'est à partir des images du boulet et en dessous que mon expérience de maréchal-ferrant est la plus utile. De mon point de vue, j’aime faire les radiographies avec les fers, puis sans les fers. Je me renseigne sur la durée de ferrage du cheval au moment de la prise des clichés.
Selon moi, si la ferrure a plus de 15 jours, les radiographies sont moins significatives. En effet, le cheval a déjà poussé dans son pied, et l’aplomb est en train de se modifier. Pour une visite d’achat, je recommande donc à mes clients d’observer les chevaux ayant moins de 15 jours de ferrure.
Lorsque le cheval est déferré, cela permet d'observer particulièrement comment l'animal se comporte au niveau des talons. La pince à sonder permet de détecter les bleimes, les hématomes, et les douleurs éventuelles au niveau des talons et de la sole, notamment.
Le pied doit être nettoyé uniquement à la brosse. Tout parage est évidemment à éviter. Il est essentiel d'observer la ligne blanche et d’examiner les parois : sont-elles solides ou s’effritent-elles par en dessous ?
Si l’aplomb est mauvais, ai-je suffisamment de pied pour le rectifier ?
L’ensemble de ces questions me permet d’anticiper si le cheval peut être amélioré avec quelques ferrures ou si des prises en charge plus conséquentes seront nécessaires pour l’acquéreur."
