Gestion en collaboration vétérinaire équin et maréchal-ferrant à l'Ecole Militaire d'Equitation de Fontainebleau.
Cas partagé par Armand Carlier.
Rappel anatomique : L’appareil podotrochléaire du cheval
L’appareil podotrochléaire se compose de l’os naviculaire (os sésamoïde distal), des ligaments sésamoïdiens, de la partie distale du tendon fléchisseur profond du doigt (TFPD également appelé perforant) et de la bourse podotrochléaire.
La bourse podotrochléaire permet un meilleur glissement du tendon fléchisseur profond sur l’os naviculaire.
Les atteintes de l’appareil podotrochléaire sont des causes fréquentes de boiteries chroniques du pied, les chevaux souffrant de ce type de lésions, sont alors couramment définis comme “naviculaires”.
Soulager la partie postérieure du pied
Dans le cas d'une inflammation de la bourse podotrochléaire, un des objectifs visés par le vétérinaire équin et le maréchal-ferrant est de soulager la partie postérieure du pied du cheval.
Avant de définir les stratégies en maréchalerie possibles à mettre en place, des examens cliniques sont minutieusement réalisés par les professionnels : vérification de la locomotion, prise de radiographies orthopédiques, examens en statique, évaluation de l’état des pieds.
La collaboration maréchal/vétérinaire permet dans ce cas de définir les options à envisager pour soulager l’animal.
Comme par exemple dans le cas présenté dans cet article, une ferrure légère en aluminium a été adoptée, avec une application prononcée d’un rolling et d’oignons pour augmenter la surface d’appui du pied au sol.
Pour ce cheval atteint d’un syndrome naviculaire de l’antérieur droit, le recours à une ferrure ACR 332 a été choisie par l’équipe soignante.
Ce fer full rolling sur les deux tiers de sa couverture permet de faciliter les effets de levier antérieurs, postérieurs et collatéraux.
Les contraintes sur les ligaments collatéraux, distaux et proximaux sont ainsi diminuées ainsi que les tensions sur le tendon fléchisseur profond du doigt.
Les éponges élargies de cette ferrure protègent quant à elles les talons sensibles, et augmentent la surface d’appui en partie arrière du pied. L’enfoncement du sabot en sol souple sera aussi limité.
Le plan de parage a été réalisé à la suite de la lecture des radiographies orthopédiques prises.
Le parage en pince pour ce cheval a nécessité un gros travail sur le pariétal afin de rééquilibrer le centre de gravité.
Maréchal-ferrant et vétérinaire avaient pour objectif d’avoir un angle de pince supérieur à 45 degrés, afin de rééquilibrer les points de charges du pied. Le cheval soulage ainsi la pression sur la partie postérieure du sabot et la reprise de hauteur en talon est encouragée.
Le recours à la technologie Metron est alors particulièrement utile pour le suivi précis de cet angle dans le temps nous explique Armand :
“Dans le cas de cette inflammation du pied, j’ai recherché à la première ferrure à atteindre un angle de minimum 45° et à récupérer en hauteur de talon. Cela en accord avec le vétérinaire.
Quand j’ai pris en charge ce cheval il n’avait vraiment pas beaucoup de talon, moins de 1 cm.
Le Metron est un outil génial pour ce type de chevaux car en tant que maréchal on peut vite être hésitant avec des pieds comme ça. L’outil permet d’aller au maximum de ce que nous pouvons faire et il est idéal pour voir le suivi.
Je ne prends pas des clichés à chaque ferrure mais plutôt une ferrure sur deux ou trois pour être sûr de bien garder des angles corrects et voir précisément l’évolution des sabots.”
Pour le ferrage, les pinçons ont été retirés pour reculer le fer, répartir les points de pression et ainsi soulager les talons du cheval.
Protocole de ferrure
Le suivi de ferrure nécessite dans le cas présenté, un referrage toutes les 4 à 5 semaines. L’objectif étant de maintenir au maximum l’axe interphalangien.
Tant que celle-ci est bien supportée par le cheval, la ferrure reste inchangée (ACR 332).
De plus, ce fer convient bien à la phase de reprise de travail.
Pour cette prise en charge, Armand (maréchal-ferrant de l’Ecole Militaire d’Equitation de Fontainebleau) et un des vétérinaires de l’EME, ont anticipé une stratégie à adopter dans le cas où le cheval montrerait de nouveaux signes de douleurs.
Dans cette hypothèse, l’ajout de plaques avec un silicone pour augmenter le confort de l’équidé a alors déjà été étudié.
Inflammation de la bourse podotrochléaire,
partage d’expérience par Armand Carlier
“Si je devais donner un conseil sur les pièges à éviter dans ce type de prise en charge, ce serait de ne pas avoir peur d’aller trop loin dans la rectification des aplombs. Les risques sont effectivement l’apparition de certains signes d’inconforts durant quelques jours.
Mais cette stratégie reste selon moi préférable, car elle permet de régler au plus vite les problèmes de charges et d’équilibres des pieds.
De plus, si la collaboration avec un vétérinaire et la prise de radios des pieds sont possibles cela vous aidera grandement pour ce type de ferrures peu fréquentes, mais tellement intéressantes à réaliser.
Toutes les ferrures orthopédiques peuvent être délicates à poser. Cela est empiré lorsque l’on travaille sans l’avis et l’analyse d’un vétérinaire selon moi.
Les échanges entre maréchaux et vétérinaires permettent d’accéder je pense aux solutions les mieux adaptées pour le cheval et la pathologie qu’il rencontre, car chacun apporte son expérience dans le domaine d’expertise qu’il maîtrise.
Médecine vétérinaire et maréchalerie sont deux métiers très différents et en même temps tellement complémentaires.
Leur liaison permet de réussir à soulager, à soigner et même d’optimiser certains chevaux. C’est ce que je peux conclure de mon expérience.
Nombre de pathologies nécessitent de pouvoir avoir une analyse objective des tissus internes du pied.
Malgré toute notre expérience pour lire les aplombs et la boîte cornée nous ne pouvons pas voir concrètement à l’intérieur du sabot.
Dans ces situations les examens vétérinaires sont là encore primordiaux. Tout comme les échanges entre professionnels, conditions obligatoires, pour réussir à adapter la meilleure ferrure à chaque cas.”
Inflammation de la bourse podotrochléaire, existe-il des moyens de prévention ?
Malheureusement, les moyens de prévention sont difficiles selon Armand.
Les causes de ce type d’inflammation peuvent être très nombreuses et multifactorielles : entraînement mal adapté, mauvais suivi ou entretien des pieds.
Comme par exemple une ferrure trop longue trop longtemps, des défauts d’aplombs etc.
La détection précoce par le maréchal est une tâche ardue car ce dernier n’a pas la possibilité de voir à l’intérieur des pieds de l’animal. C’est bien souvent la déclaration d’une boiterie qui poussera à des examens vétérinaires et qui permettra de déterminer l’origine du symptôme. Dans ce cas, le mal est déjà là.
“À part essayer de faire notre travail en prenant le temps de lire, d’analyser et même des fois de déchiffrer les aplombs je ne pense pas qu’il y ait grand chose à faire.
En tant que maréchal, nous devons essayer au maximum d’être dans l’idéal du pied tant au niveau du parage que du ferrage.
De son côté aussi, le cavalier peut essayer de programmer judicieusement ses séances afin de ne pas sur-solliciter physiquement son partenaire équin. Une attention particulière aux conditions de travail (sols, état des pieds, présence d’asymétries monté etc) participent à la bonne surveillance des équidés.
Sans être des sciences exactes, l’alimentation, le bien-être général etc. ont également leurs rôles dans le maintien ou la dégradation d’un cheval.
Il faut finalement garder à l’esprit que la maréchalerie est un élément parmi beaucoup d’autres dans la santé des pieds et de la locomotion des chevaux.” conclut Armand.